En ces temps où le racisme semble revenir comme la mauvaise graine dans les jardins, Man to man est une antidote salutaire qu’on recommande à tous les spectateurs !
Le film de Régis Warnier, réalisateur français qui tourne ici avec une équipe essentiellement anglophone, commence comme un film d’aventures. Nous sommes au 19° siècle, l’Afrique est à la mode à cause de la colonisation. On s’arrache les lions et les toucans dans les zoos et des scientifiques, bardés des meilleures intentions du monde, tentent de prouver au reste du monde la supériorité de la civilisation occidentale, pendant que les missionnaires font la même chose, et souvent avec les mêmes méthodes contestables, pour la religion chrétienne. Certes, on pourrait tous les excuser en disant « qu’ils ne savaient pas ». Justement, le film de Régos Warnier nous montre qu’on pouvait savoir…
Trois chercheurs britanniques, qu’on appellerait aujourd’hui des anthropologues, essayent de démontrer que le chaînon manquant entre le singe le plus évolué et l’homme le plus primitif, est le pygmée d’Afrique. L’un d’eux part en capturer deux spécimens, un male et une femelle, pour pouvoir les étudier tranquillement en Europe et présenter la conclusion de leurs travaux (donc ils sont d’avance persuadés) devant d’autres scientifiques. Très vite, Jamie, le héros du film qui a subit le voyage en Afrique (palus, chaleur, coup de feu, course dans les rapides, moustiquaires et autres écueils obligatoires dans toutes aventures africaines) se rend compte que les pygmées ne sont pas des animaux mais des être humains capables de réfléchir et de s’émouvoir. Ca ne plait pas du tout à ses deux comparses pour qui les pygmées doivent rester des animaux, sinon leur théorie ne tient pas. Donc le film d’aventures tourne au drame, nos postulants académiciens étant prêts à tout pour un peu de gloire…
Non seulement Man to man est un film captivant, avec des retournements de situation qui font vibrer le spectateur (qui sont les bons, qui sont les méchants, qui va s’en sortir ?) mais il nous oblige à revoir magistralement notre propre histoire. Certains savaient que le racisme était juste une invention de peuples prétentieux qui, faute de connaître l’autre dans sa vérité et son humanité, se croyaient supérieurs. On appréciera aussi toute la subtilité et l’humour qui sont le fondement du personnage féminin. D’une part parce qu’il est joué par Kristin Scott-Thomas, toujours aussi ravissante que ce soit en pirogue ou en calèche, mais surtout parce qu’elle représente à la fois le pire et le meilleur du capitalisme. Le pire quand elle pille sans vergogne les richesses naturelles de l’Afrique, le meilleur quand elle prend le parti d’une science qui libère l’individu au lieu de l’oppresser. Un film à multiples lectures donc et qui se savoure pour le simple plaisir du cinéma !