Aujourd’hui, chers amis, je vous propose de faire attention à ces salutations, au sens qu’elles donnent à notre existence chrétienne, et finalement à l’attitude pastorale que nous avons à avoir à l’égard de tous ceux que nous côtoyons.
L’attention de Paul nous impressionne, nous enseigne et finalement nous engage.
Près d’une vingtaine de salutations sont répétées et pas moins de trente-cinq personnes sont nommément citées, décrivant ainsi une communauté vivante, riche de multiples personnalités aux histoires variées. De cette longue énumération, nous pouvons retenir trois enseignements simples mais essentiels :
* chaque croyant est unique,
* chaque croyant est utile,
* chaque croyant est frère ou sœur dans le Christ.
Chaque croyant est unique. Cela ressort de la singularité de tous les prénoms dont se souvient l’Apôtre et qu’il tient à nommer précisément.
Ensuite, chaque croyant est utile : l’Apôtre mentionne très souvent ce que chacun a fait pour la construction de la jeune Église. Qu’il s’agisse de Phébée, « ministre de l’Église de Cenchrées, protectrice de bien des gens et de moi-même » dit Paul, qu’il s’agisse de Prisca et Aquilas, « mes compagnons de travail en Jésus-Christ, eux qui ont risqué leur tête pour me sauver la vie »… Qu’il s’agisse encore de Marie « qui s’est donné beaucoup de peine pour vous » ou d’Urbain, « un autre » compagnon de travail dans le Christ.
Enfin, chaque croyant est salué, dans le Christ, comme frère ou sœur. En effet, c’est dans le Christ que tous sont salués, les uns sont salués comme « coopérateurs », ou « Élu du Seigneur », « membres du Christ », « frères et sœurs » en Lui. Dans le Seigneur, tous se reconnaissent de la même famille : non seulement Paul parmi ses frères et sœurs croyants, ses « parents » même, mais aussi Tertius son scribe qui en profite pour saluer à son tour « dans le Seigneur », avec Gaïus, avec Éraste et Quartus… Quelle famille vaste et accueillante … dans le Seigneur !
N’est-ce pas pour nous, chers confrères, en charge d’annoncer la Bonne Nouvelle du Salut, un précieux rappel de notre ministère le plus élémentaire ? Aller vers nos contemporains, faire attention à eux, les accueillir avec leur personnalité et leur histoire singulières, les saluer, leur souhaiter la Paix de la part de Dieu… Entrer en amitié avec eux, leur révéler que Dieu les aime et nous aime, leur permettre, comme le fit si bien le Christ, d’apporter leur contribution au bien de tous, à la construction du Royaume ? Nous n’aurons jamais fini de faire attention les uns aux autres et c’est précisément quand nous baissons cette attention que nous désertons la charité de Dieu… Souvent, nous n’avons rien à partager, pensons-nous, et pourtant nous pouvons, au moins, nous saluer, recevoir un regard neuf, offrir le nôtre, nous considérer chaque jour d’un regard attentif et reconnaissant. Oui, reconnaissant, pour le bien que l’autre fait, pour la présence de Dieu qu’il porte en lui, comme celle qui est aussi en moi et qui secrètement nous relie. Ainsi devenons-nous Frères et Sœurs dans le Christ.
À la centaine d’Évêques de France et d’Outre-Mer se sont joints tant de confrères de tous les pays d’Europe et d’Afrique… Leur venue parmi nous est, en elle-même, une salutation et un encouragement : comment ne pas les saluer et les encourager à notre tour en les nommant comme le fit notre président de conférence, en les accueillant et en dialoguant avec eux ? Comment ne pas saluer tous les autres invités, l’hôte de ce jour, les religieuses, religieux, collaborateurs, observateurs, tous les membres des services de la Conférence et ceux du généreux accueil de Lourdes…
Comment ne pas reconnaître en toutes ces personnes, le don de Dieu, des sœurs et des frères dans le Seigneur ? Pour bien saluer, souvenons-nous, en cette cité mariale, de la belle salutation de l’ange à Marie, et de celle qu’à son tour Marie fit avec tant de prévenance à sa cousine Élisabeth.
Finalement, le salut familial, le salut amical, la politesse quotidienne, du simple bonjour aux expressions plus cordiales, n’est-ce pas le premier partage de la Bonne Nouvelle ? C’est pourquoi aujourd’hui, au cours de notre célébration, veillons à répondre avec charité et foi à l’invitation de l’Apôtre : « Saluez vous les uns les autres en échangeant le baiser de Paix » !
(Homélie de Mgr Jean-Pierre Grallet, archevêque de Strasbourg, à partir du chapitre 16 de l’épître aux Romains. Lourdes – samedi 7 novembre 2009).